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Les différents types de biodéchets vitivinicoles et voies de valorisation

La biomasse vitivinicole est constituée d’une part des coproduits générés par la viticulture : les sarments et les souches et d’autre part des coproduits générés par la vinification : les marcs de raisins, les lies de vins et les bourbes. Ces coproduits peuvent être valorisés de différentes façons d’un point de vue environnemental, agronomique et économique et ce dans un cadre réglementaire. Afin d’accompagner les opérateurs du Val de Loire, dans le choix de voies de valorisation pertinentes, l’IFV et InterLoire ont réalisé l’Atlas Biomasse vitivinicole - Bassin du Val de Loire. Cet outil recense et localise qualitativement et quantitativement à la fois la ressource et les installations de valorisation, sous forme cartographique et répertorie les acteurs locaux de cette filière.

Définition réglementaire des différents coproduits

  • Biomasse viticole

- Les sarments sont les rameaux d’un an bien développés*. Vus sous le prisme de la valorisation de la biomasse, les sarments sont une biomasse majoritairement cellulosique et hémi-cellulosique, renouvelée chaque année durant la taille (Favre, 2017).

Tableau 1 : Caractéristiques agronomiques et énergétiques des sarments
(PCI: Pouvoir Calorifique Inférieur) 

 

- Les souches ou ceps ou pieds de vigne issus des arrachages de parcelles entières et de pieds morts ou malades sur les parcelles en production. Elles constituent une biomasse majoritairement ligneuse.

 

  • Biomasse vinicole

- Les marcs de raisins sont les résidus du pressurage des raisins frais, fermentés ou non.

Tableau 2 : Caractéristiques agronomiques et énergétiques des marcs de raisins-source IFV, 2013
(ISMO : indice de stabilité de la matière organique)

 

- Les lies de vin sont constituées par les résidus (essentiellement des levures mortes et particules végétales) se déposant dans les cuves ou barriques contenant du vin, après fermentation, lors du stockage ou après un traitement autorisé (type collage) et des résidus issus de la filtration ou de la centrifugation du vin. 

Tableau 3 : Caractéristiques agronomiques et énergétiques des lies de vin
               source : projet Valormap, 2018

 

- Les bourbes sont constituées des résidus (particules solides majoritairement végétales) se déposant dans les cuves ou barriques contenant du moût de raisin avant fermentation et des résidus obtenus lors de la filtration ou centrifugation des mêmes moûts.

Les voies de valorisation

Les voies de valorisation autorisées par la réglementation varient en fonction des différents types de biomasse. Quatre d’entre elles nécessitent des installations dédiées : la distillation, la méthanisation, le compostage et la combustion en chaudière biomasse.

Tableau 4 : Voies de valorisation autorisées par type de biomasse vitivinicole
(cases grises = voie de valorisation autorisée) 
* Sans résidus de palissage et sans terre

 

Pour rappel, jusqu’en 2014, l’obligation communautaire de l’élimination des marcs de raisins, lies et bourbes issus de la vinification se traduisait pour les viticulteurs français par l’obligation de livraison de la totalité des co-produits vinicoles en distillerie vinicole agréée. Le décret du 18 août 2014 relatif à la valorisation des résidus de vinification intégra la méthanisation et le compostage comme d’autres voies possibles de valorisation. Concernant les co-produits d’origine viticole, d’après la note des ministères en charge de tutelle, il n’existe pas d’interdiction stricte de brûlage à l’air libre des sarments et des souches au sein des exploitations agricoles au niveau national. Cet usage, de moins en moins utilisé pour les sarments mais toujours très pratiqué pour les souches, doit toutefois être limité et des restrictions par arrêté peuvent être émises selon les préfectures, en particulier lors d’épisodes de pollution ou dans des zones soumises à un Plan de Protection de l’Atmosphère (PPA).

  • La distillation

Les distilleries vinicoles s’inscrivent dans une économie circulaire en collectant et recyclant les marcs de raisins, les lies de vin, les bourbes et les vins en de nombreux co-produits commercialisés (voir ci-dessous dans différents secteurs comme l’agriculture, la viticulture, l’élevage, l’agro-alimentaire, l’énergie, l’industrie cosmétique et chimique). Leur valeur marchande est propre à chaque coproduit commercialisé, en fonction de son marché. Dans la majorité des cas, du fait des aides à la collecte et à la transformation, pour le vigneron, le transport et la valorisation des sous-produits de la vinification se font à coût zéro. Lorsqu’un coût est facturé, il est déterminé par les distilleries et varie en fonction des régions et des campagnes de 21 à 26 euros par tonne de marc de raisins. D’un point de vue environnemental, l’importante consommation d’énergie du fait du processus technique lui-même est l’axe d’amélioration majeur. Différentes solutions existent pour optimiser le bilan énergétique des distilleries : modernisation et optimisation des infrastructures, intégration de la méthanisation dans le processus de distillation afin de produire du biogaz, mise en place de chaudière biomasse.

Source : Cahier Itinéraires n° 25, Marcs de raisins, lies de vin et bourbes : Quelle gestion des sous-produits, vinicoles ? IFV, novembre 2013

 

  • La méthanisation

La méthanisation est un processus biologique de dégradation de la matière organique en l’absence d’oxygène (digestion anaérobie). La méthanisation conduit, à partir de la matière organique introduite dans un digesteur, à la production de biogaz et de digestat (produit résiduel issu de la méthanisation, contenant des éléments minéraux et de la matière organique y compris les pépins de raisins non biodégradés). Le biogaz est constitué de 55 à 65% de méthane, utilisable comme source d’énergie. Il existe deux voies de valorisation du biogaz : La cogénération (production d’électricité et de chaleur) et l’injection dans le réseau de gaz de ville. Le digestat quant à lui doit être épandu. Et comme il contient du marc de raisins, il a le statut de déchet et doit être épandu selon un plan d’épandage, précédé d’une étude préalable et accompagné d’un suivi agronomique. Le coût de la méthanisation de marcs de raisins pour le viticulteur est fonction de la quantité méthanisée, des coûts de transport et de traitement, de 20 à 80 euros la tonne.

  • Le compostage

Le compostage consiste en un traitement biologique de déchets ou matières organiques fermentescibles en milieu fortement oxygéné. Cette technique s’applique généralement aux déchets fermentescibles, aux déchets verts, aux déchets agricoles, aux boues de station d’épuration. Elle peut s’appliquer à des déchets issus d’activités industrielles qui ont une forte teneur en matière organique (déchets de l’industrie agro-alimentaire notamment). Le compost contenant du marc de raisins a le statut de déchet et doit être épandu selon un plan d’épandage, précédé d’une étude préalable et accompagné d’un suivi agronomique. Le coût de ce traitement est très variable, entre 60 et 100 euros la tonne et dépend de l’emplacement de la plateforme de compostage et de la provenance des marcs (propre à l’exploitant ou provenant de plusieurs exploitations). D’un point de vue technique, son efficacité sera fortement liée à la capacité d’aération et de ventilation des andains.

  • La combustion en chaudière Biomasse

Pour pouvoir être intégrés dans une chaudière biomasse, les sarments et souches doivent être broyés au préalable. L’intégration des souches dans une chaudière est possible mais peu répandue car la terre présente sur les souches pose des problèmes d’évacuation des cendres dans la chaudière, impliquant un criblage plus coûteux. La biomasse viticole peut être mélangée à d’autres biomasses (sciure de bois) et être intégrée sous différentes formes : en plaquettes (broyat), en granules ou en briquettes.

  • L’épandage direct

L’épandage est défini comme “toute application de déchets, effluents sur ou dans les sols agricoles”. Dans le cas des sarments, il se réalise directement à la parcelle au niveau de l’inter-rang et après un broyage préalable. Cette pratique est commune dans le vignoble, les équipements de broyage dans les exploitations sont fréquents. Dans le cas des marcs de raisins, les conditions d’épandage sont régies dans le cadre de la réglementation des ICPE. Celles-ci dépendent du classement et du régime ICPE (installation classée pour la protection de l’environnement) de l’installation qui produit le déchet. Les installations de production de vin susceptibles de produire et d’épandre des déchets (ou effluents) relèvent principalement de la rubrique n° 2251 (Préparation, conditionnement de vins). A l’intérieur de cette rubrique, elles peuvent être soumises à des régimes différents, en fonction du volume de vin produit : l’autorisation, l’enregistrement et la déclaration. Depuis le 26 novembre 2012, elles peuvent également relever de la rubrique n° 3642 (Traitement et transformation de matières premières en vue de la fabrication de produits alimentaires), elles sont alors soumises à autorisation. Les différents textes qui réglementent l’épandage de déchets ou effluents intègrent des critères relatifs à l’intérêt agronomique du déchet épandu, les caractéristiques du sol recevant le déchet, le stockage des déchets avant épandage, la période d’épandage, le lieu d’épandage, la réalisation d’un plan d’épandage, le suivi agronomique de la parcelle. Le coût d’épandage de marcs de raisin pour le viticulteur varie en fonction des modalités d’épandage. D’environ 70 euros/tonne quand l’épandage est réalisé par un prestataire de service à partir d’une plate-forme de stockage collective à plus de 100 euros la tonne quand cela est réalisé à l’exploitation. La différence étant liée à l’acquisition de matériel spécifique. La surface d’épandage nécessaire restant un facteur limitant dans le choix du mode de valorisation. Dans certaines zones, faute de surface, l’épandage n’est pas possible.

  • Les voies de valorisation émergentes

De nouvelles voies de valorisation innovantes émergent, telles que l’extraction de principes actifs substances poly-phénoliques anti-oxydantes à partir de sarments ou souches dans le domaine du cosmétique ou bien la création de matériaux biosourcés dans le domaine de l’éco-conception, utilisation comme bois de barbecue. Mais elles ne constituent pas à elles toutes seules des filières bien organisées, susceptibles de valoriser des volumes significatifs à date. Par ailleurs, des réflexions sont en cours, notamment conduites au sein du Vinopôle Centre-Val de Loire, pour la valorisation des ceps de vigne par pyrogazéification pour la production de chaleur, de biogaz et de biochars (charbon végétal) potentiellement valorisables à la parcelle comme fertilisants. Cette voie de valorisation prometteuse sur bien des aspects présentent plusieurs freins, rendant la création de ce type de filières difficile :  les coûts de ramassage et de stockage, la présence de résidus de métaux notamment de cuivre et produits phytosanitaires comme l’arsénite de soude dans la biomasse, la dépense énergétique due à la pyrogazéification dans un contexte d’économie d’énergie.

 

Pour en savoir plus :

5 fiches de synthèse, valorisation des co-produits de la vinification, FranceAgriMer

Cahier Itinéraires n° 25, Marcs de raisins, lies de vin et bourbes : Quelle gestion des sous-produits, vinicoles ? IFV, novembre 2013

* définition issue du Lexique de la vigne et du vin, édité par l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin (OIV, 1963)

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