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22.09.2022

Les clés d’une bonne conservation des vins rouges


Intrants œnologiques

Hygiène / Microbiologie du vin

Les clés d’une bonne conservation des vins rouges

Compte tenu des aléas climatiques récurrents, la maîtrise des stocks tant d’un point de vue qualitatif que quantitatif s’avère aujourd’hui un enjeu majeur pour le pilotage d’un vignoble. Le syndicat des vins de Chinon a ainsi saisi l’opportunité le 6 septembre dernier, dans le cadre de sa journée technique pré-vendanges, d’aborder la thématique du stockage et la conservation des caractéristiques organoleptiques, dans les vins rouges en vrac.

La flore microbienne présente dans les moûts et dans les vins est constituée principalement de levures, fermentaires et non fermentaires et de bactéries lactiques et acétiques. En fermentation alcoolique, se développeront majoritairement des levures dites fermentaires transformant les sucres en alcool, genre saccharomyces cerevisiae. En fermentation malo-lactique, ce sont des bactéries lactiques (oenococcus, lactobacillus plantarum, pediococcus), majoritairement, qui métaboliseront l’acide malique en acide lactique. Au cours de l’élevage, pendant la phase de stockage et jusqu’en bouteille, différentes populations, résistantes à l’alcool et au SO2, capable de vivre en état de stress, dans des milieux pauvres en nutriments, favorisées par des conditions d’environnement plus favorables (température, ph élevé), seront susceptibles de proliférer et d’induire diverses altérations modifiant le profil aromatique et gustatif du vin. On peut citer brettanomyces (levures) productrices de phénols volatils, candida (levures) responsables de la maladie de la fleur (formation d’un voile de surface), des bactéries acétiques (aérobies) genre acétobacter ou gluconobacter responsables de piqûre acétique (production d’acide acétique et d’acétate d’éthyle). Les bactéries lactiques peuvent également, si elles dégradent des sucres, provoquer une piqûre lactique.

Un suivi de cette flore indispensable

Lors de son intervention, Marie-Charlotte Colosio de l’IFV pôle Val de Loire-Centre a insisté sur le goût de souris, présent de manière récurrente dans certains vins, du fait d’une moindre utilisation de SO2 avec des Ph toujours plus élevés. « Il apparaît en cours d’élevage et de stockage, après les fermentations ; il est perceptible uniquement en bouche en rétro-olfaction, quand le Ph du vin augmente au contact de la salive avec des seuils de perception variables en fonction de l’individu. Il peut être produit par des bactéries lactiques et des levures d’altération comme brettanomyces », rappelle-t-elle. Pour prévenir toute déviation, Marie-Charlotte Colosio conseille un suivi de la population microbienne en cours d’élevage et de stockage, l’observation de bonnes pratiques œnologiques pour éviter les contaminations initiales (maîtrise des températures, teneur en SO2 suffisante, hygiène du chai et des matériels) et des interventions de manière préventive. « Nous constatons souvent l’altération tardivement, à postériori, à la dégustation », remarque-t-elle.  En actions correctives, l’utilisation de lysozyme, permettant une diminution de la population de bactéries lactiques, de Chitosane dans le cas de développement de brettanomyces, peuvent être des alternatives efficaces comme la flash-pasteurisation et la filtration, complète Marie-Charlotte Colosio.

Attention à l’oxygène dissous

Tout au long du stockage d’un vin en vrac, deux éléments-clés seront déterminants et nécessaires de maîtriser pour une bonne conservation : l’oxygène et sa capacité à être solubilisé et consommé et la teneur en SO2. L’oxygène, au contact du vin se solubilise jusqu’à saturation - on parle d’oxygène dissous, seule forme capable d’être dosée dans le vin - puis est consommé. Les basses températures en cours de manipulation, les phénomènes d’émulsion en cuve et au niveau des pompes à vin lors des transferts, l’augmentation de la surface de contact entre l’air et le vin en cuve seront des facteurs facilitant sa dissolution. En phase statique, les températures élevées (>17°c), favoriseront une consommation plus rapide de l’oxygène dissous. La présence de polyphénols et de lies de levures en le métabolisant protègeront quant à eux d’autres constituants du vin (matières colorantes et arômes). « Pratiquement, il serait souhaitable de maintenir une température de stockage entre 8 et 12°c en hiver, idéalement entre 12 et 15°c (hors périodes hivernales), privilégier une température >13°c lors de manipulations, en limitant les vitesses de pompage notamment en fin et en début d’opération et la longueur des tuyaux », précise Pascal Poupault de l’IFV pôle Val de Loire-Centre.

Optimiser la gestion du SO2

Le SO2, utilisé à bon escient, grâce à ses propriétés, protège le vin contre l’oxydation (1mg /l d’O2 dissous oxyde 1 à 4 mg/l de SO2) préservant ainsi couleur et arômes. Il protège également le vin des déviations microbiennes (propriété antiseptique du SO2). Il revêt deux formes : le SO2 combiné peu efficace et le SO2 libre dont une fraction, le SO2 actif ou moléculaire représente la part la plus active. La proportion de cette dernière fraction est variable en fonction du ph, du degré et de la température. Une application proposée par l’IFV Occitanie permet de la calculer et d’ajuster précisément un sulfitage, en fonction du niveau de protection souhaitée. De manière générale, Pascal Poupault recommande de maintenir une teneur suffisante en SO2 libre en cours de stockage de l’ordre de 25 mg/l, de rajouter l’équivalent d’1 g/hl lors de transfert, tout en respectant les teneurs maximales légales.

Inerter les cuves en vidange et lors des transferts

L’inertage permet de limiter la dissolution de l’oxygène dans le vin lors du stockage et des transferts. Il consiste à injecter un gaz inerte azote ou CO2 au niveau des ciels de cuve en vidange, des tuyaux et cuves de réception. L’azote est le gaz le plus utilisé en œnologie. Il a l’avantage d’être plus économique et se dissout peu à contrario du CO2 qui petit à petit se solubilise dans le vin. Par contre dissous dans le vin, le CO2 réduit la vitesse de dissolution de l’oxygène. « Il est important de maintenir un niveau de SO2 libre suffisant et une température stable et fraîche pour prolonger la stabilité organoleptique des vins rouges stockés en vrac. Le collage, une teneur en CO2 élevée peuvent aussi contribuer à préserver la fraîcheur des vins » souligne Pascal Poupault. Après un échange avec la salle, Laure CAYLA de l’IFV Nouvelle Aquitaine, en conclusion de cette matinée, mis l’accent sur l’intérêt de mettre en place un suivi microbien des vins stockés afin d’anticiper les problèmes et d’identifier en amont l’aptitude des cuvées à se conserver en fonction de leur caractéristique organoleptique notamment leur teneur en polyphénols (tannins).  

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