25.01.2021
Intrants viticoles
Environnement
Quels sont les processus de transfert des produits phytosanitaires dans l’air ? Quelles sont les solutions performantes pour limiter ces transferts ? Le projet national RePP’air, lancé en 2017 et dont les résultats au niveau Pays de la Loire ont été présentés en décembre dernier, avait pour objectif de répondre à ces questions.
Le transfert de produits phytosanitaires dans l’air apparait au cours d’une application, par dérive, ou après celle-ci, par volatilisation voire par érosion éolienne. La temporalité du transfert ainsi que l’état (gouttes, gaz, aérosols) diffèrent, impliquant une variabilité des concentrations en un lieu et un moment donnés selon le processus d’émissions, le devenir des composés dans l’atmosphère, leur transport, leur dépôt et la configuration spatiale (présence de haies ou non par exemple). Des outils, comme EvaSprayViti de l’IRSEA/IFV, ont été développés pour mesurer les émissions vers l’atmosphère selon le processus de transfert et pour étudier leur déterminisme. Ainsi les facteurs modifiant les émissions par dérive aérienne sont au nombre de quatre : la bouillie (formulation/adjuvants), la pulvérisation (type de pulvérisateur, de buse…), les conditions météo (vent, humidité relative,…) et la culture (densité, porosité,…..). Le taux de volatilisation est lui influencé par la caractéristique de la matière active (la formulation,…), les pratiques (dose, date d’application,…), les propriétés de la surface du sol et de la feuille (teneur en eau, en matière organique, pH du sol,…) et les conditions météo. Les travaux de recherche se poursuivent pour assoir les méthodologies de mesure, établir des protocoles harmonisés au niveau européen, développer des modèles d’émission, de devenir atmosphérique à différentes échelles spatiales et pour préciser l’effet de certains facteurs déterminant comme l’effet de la formulation des produits.
Le projet RePP’air a permis de réaliser des mesures hebdomadaires de teneur en produits phytosanitaires dans l’air et de les mettre en lien avec les pratiques agricoles identifiées via des enquêtes. L’étude a été menée sur 7 sites en France, dont le Lycée viticole de Briacé (44) où 42 molécules ont été collectées et analysées d’avril à septembre sur les millésimes 2017,2018 et 2019. Parmi elles, 24 molécules ont été retrouvées dans l’air à différentes fréquences de quantification sur les 3 années. Le folpel est la molécule la plus fréquemment retrouvée, des herbicides de grandes cultures sont également identifiés ainsi qu’une molécule interdite depuis 1998, le lindane. Cette molécule a eu des utilisations multiples dépassant le cadre agricole et des phénomènes de relargage des sols peuvent expliquer sa présence dans l’air aujourd’hui. Dans l’environnement du lycée viticole de Briacé, le suivi montre une prédominance des fongicides (81 % des molécules retrouvées dans l’air), les insecticides ne représentant que 14 % et les herbicides 5%. Les analyses montrent une forte cohérence entre la présence des molécules et la période de leur utilisation dans les traitements. Il existe néanmoins des variabilités de concentration mesurée entre les années, sans doute à mettre en lien avec les conditions météorologiques qui conditionnent la pression maladie et le développement du végétal. Le soufre et le glyphosate n’ont pas été analysés dans l’étude car les normes de collecte et d’analyse sont différentes de celles retenues pour le projet RePP’air.
Dans le cadre du projet, quatre leviers ont été identifiés pour limiter le transfert des produits phytosanitaires dans l’air. Le premier est le recours à des méthodes alternatives pour réduire l’utilisation des phytosanitaires : l’effeuillage, l’ébourgeonnage pour limiter les fongicides, l’enherbement, le travail du sol pour éviter les herbicides ou le biocontrôle pour réduire les insecticides…. L’amélioration des conditions d’application est un autre axe souligné avec la nécessité de traiter dans de bonnes conditions (vent, température, humidité), d’employer du matériel bien réglé et limitant la dérive (panneau récupérateur, buses adaptées,…). Enfin, certaines substances sont moins volatiles que d’autres : le changement d’habitude dans le choix des produits est un troisième axe identifié, le dernier étant l’aménagement du territoire avec notamment l’installation de haies et le développement de la biodiversité. Notons également le recours aux variétés résistantes dans le cadre d’une production de vin sans IG ou d’IGP. Des fiches synthétiques de bonnes pratiques, à visée pédagogique, seront disponibles prochainement sur le site de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. En termes de perspectives, des travaux de l’ANSES sont en court pour expertiser, évaluer les conséquences de la présence des phytos dans l’air. Un projet RePP’air II pourrait aussi se pencher sur la dispersion des molécules et leur déplacement.
Des webinairs pour en savoir plus:
Plaquette Repp’air : Réduction des produits phytosanitaires dans l’air