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17.04.2023

Vers un dispositif assurantiel, levier de transition agro-écologique


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Vers un dispositif assurantiel, levier de transition agro-écologique

A l’initiative de la Région Nouvelle-Aquitaine, le programme VitiREV, fédère depuis 2019, les acteurs des territoires viticoles pour accélérer la sortie des pesticides, en intégrant des pratiques agro écologiques. Participant à cette dynamique collective, l’UMT SEVEN (1) (INRAE, Bordeaux Sciences Agro et l’IFV Nouvelle-Aquitaine) et une équipe de chercheurs en économie, conduisent des expérimentations et une réflexion sur l’opportunité de créer un dispositif de soutien assurantiel couvrant les risques de pertes de récoltes liée aux maladies fongiques.

Un IFT diminué de 45 % et un rendement satisfaisant

Cet outil d’accompagnement, réflechi dans le cadre de ce programme de recherche, vise à garantir pour le viticulteur une compensation financière en cas de perte de récolte due au développement de maladies fongiques (mildiou, oïdium, black rot). L’adhésion à ce dispositif encore expérimental est conditionnée à l’engagement de suivi par le viticulteur-assuré d’un Plan de Traitement Assurable (PTA), formulé à partir de données issues de différents Outils d’Aide à la Décision (plateforme EPICURE de l’IFV, données Météo France, modèles Potentiels Systèmes, DéciTrait, Optidose, règles de décision spécifiques constituant le PTA expérimenté depuis 2019). L’objectif est d’accompagner la viticulture vers une transition agro-écologique traduite par la moindre utilisation d’intrants phytosanitaires (diminution de l’IFT en %), tout en conservant un équilibre économique satisfaisant. L’objectif de rendement, le capital assuré et le niveau d’indemnisation choisi seraient précisés contractuellement lors de l’adhésion au dispositif. Une évaluation des pertes en fin de campagne serait réalisée avant indemnisation. Ce protocole expérimental a été testé sur les 4 dernières campagnes avec deux opérateurs économiques : les caves coopératives de Buzet (Lot et Garonne) et Tutiac (Gironde) et une société d’assurance. Il a montré son efficacité en permettant la diminution de l’IFT de l’ordre de 45% en moyenne sur 4 ans avec un niveau de préservation de l’état sanitaire et de rendement attendu, globalement satisfaisants. Le millésime 2022, pourtant peu virulent en Nouvelle-Aquitaine, a cependant montré la difficulté de l’exercice et les limites de l’équilibre économique proposé par le contrat d’assurance expérimenté. Ce travail sera poursuivi sur le millésime 2023.

Une approche encore perfectible

Selon Marc Raynal de l’IFV Nouvelle-Aquitaine, animateur du projet, cette approche constitue un levier indispensable pour atteindre l’objectif de diminuer de 50% l’usage des produits phytosanitaires, prévu dans le plan Ecophyto II+. L’expérimentation du dispositif a permis d’identifier des points de vigilance et d’améliorations. « Le dispositif doit tout d’abord reposer sur un plan de traitement assurable le plus efficace possible. D’un point de vue purement technique, la performance du PTA reste dépendante de celle du pulvérisateur qui devrait être un élément conditionnel soumis aux exigences du contrat d’assurance. Des progrès sont aussi attendus sur des outils permettant d’évaluer avec justesse les zones parcellaires impactées par les maladies fongiques et les pertes de récolte effectives. En effet, l’expertise humaine par échantillonnage montre ses limites et semble aisément contestable dans un tel dispositif. Les Outils d’Aide à la Décision devront également évoluer pour tenir compte de la réapparition du Black Rot : la gestion de cette maladie uniquement à partir des effets secondaires des traitements anti-mildiou et anti-oïdium ne suffit plus à endiguer son développement; des règles spécifiques doivent être établies. Plus globalement dans le contexte actuel, cette démarche d’assurance ne pourra trouver un équilibre économique qu’avec un accompagnement des pouvoirs publics », indique Marc Raynal. « La baisse de 50% de l’IFT est un objectif collectif louable, mais il génère une prise de risque individuel considérable dont le coût, dans le contexte règlementaire actuel, semble rédhibitoire tant pour l’assureur que pour l’assuré », ajoute-t-il.

Quels viticulteurs pourraient être intéressés par un tel dispositif ?

Pour répondre à cette question, une enquête a été menée début 2023 par des économistes de l’Université d’Angers et de Bordeaux dans le cadre du projet BEHAVE. L’objectif est d’évaluer l’intérêt et le consentement à payer des viticulteurs pour ce type de dispositif assurant les pertes imputables aux maladies fongiques, conditionnellement au fait de suivre les préconisations de l’Outil d’Aide à la Décision afin de réduire l’usage des fongicides. Au-delà des conditions particulières de l’expérimentation VitiREV, l’enquête envisage différentes modalités de mise en place : contrat individuel ou contrat de groupe dans le cadre d’un fond mutuel, déclenchement de l’indemnisation en fonction de l’évaluation des pertes par un expert ou en fonction d’un indice de pression fongique locale (assurance paramétrique). Les résultats de ces enquêtes, publiés d’ici quelques mois, permettront d’identifier le profil des viticulteurs intéressés par un tel contrat et la baisse de consommation de fongicides susceptible d’être obtenue grâce à ce dispositif innovant.

(1) : Unité mixte Technologique Santé des Ecosystèmes Viticoles Economes en intraNts

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