30.09.2016
Millésime
Si les vendanges ne sont pas terminées sur les cépages rouges du Val-de-Loire, voire à peine commencée pour les cabernets francs et les cots, une tendance semble s’observer pour les futurs vins rouges et rosés : les volumes sont corrects à faibles selon les zones, mais la qualité est largement au-dessus de tous les espoirs, grâce à une arrière-saison très favorable.
« C’était loin d’être gagné ! Et tout n’est pas encore joué tant que les raisins ne sont pas totalement rentrés », rappelle Eric Laurent, œnologue à la Cave de Saumur. En effet, 2016 a été compliquée pour les vignes du Val de Loire (gel fin mai, explosion de mildiou en juin, puis stress hydrique juillet-août), mais cette année offre un mois de septembre beaucoup plus clément, avec ses précipitations autour du 15, puis de belles journées chaudes et ensoleillées. Des conditions idéales pour pousser les maturités. « Si cette semaine est aussi belle qu’annoncée, tout devrait aller pour le mieux, complète Eric Laurent. Les cabernets francs sont très sains, et les conditions ensoleillées avec un vent d’Est prévues devraient freiner tout départ de botrytis. Les récoltes de cabernet doivent commencer chez nous le 10 octobre, en y allant tout doucement, avec un pic d’activité prévu pour la semaine du 17 octobre. »
S’il est compliqué de se prononcer sur les volumes avant les vendanges, la Cave de Saumur table sur des rendements plutôt corrects de 45-50 hl/ha en cabernet. Sur la qualité, les écarts de maturités sur grappes et entre grappes se réduisent grâce aux bonnes conditions depuis mi-septembre. « Il faut bien choisir la date de récolte, pour éviter les goûts végétaux, en trouvant un compromis entre les baies les moins avancées qui devront être mures, et celles les plus avancées qui ne doivent pas l’être trop. En chenin, nous sommes très agréablement surpris par la qualité rentrée, et nous pouvons espérer le même comportement en cabernet. En gouttant les baies, nous observons peu de tanins secs ou durs, nous sommes plutôt sur des choses souples. Les vins de ce millésime n’auront pas une grosse structure, mais ils seront bien typés Loire, sur la fraicheur et le fruit. »
Même constat aux Caves de la Loire : ce millésime ne sera pas sur la richesse ou la concentration, estime Frédéric Moreau, l’œnologue de la coopérative : « L’eau de juin puis la sécheresse de l’été ont fait souffrir la vigne. En grolleau, les dernières pluies ont tout de même permis d’avoir une quantité au rendez-vous, et l’état sanitaire reste bon. En cabernet, nous devrions commencer les récoltes cette semaine, même si le gros des vendanges aura lieu la semaine prochaine à priori. L’état sanitaire reste là aussi bon. Quant à la qualité, il est difficile de se prononcer, avec trop peu de recul ; le contrôle maturité de ce début de semaine devrait nous éclairer davantage. »
Sur Grolleau, les jus ont commencé à fermenter, sans difficultés particulières. Cependant, le degré potentiel semble assez faible (lié aux dernières précipitations et blocages de maturité dans certaines zones), et les acidités sont relativement basses par rapport à l’année précédente complète Frédéric Moreau, qui poursuit : « Sur rosé, il faudra mettre en avant l’aromatique lors des vinifications, en jouant sur le débourbage, le niveau de turbidité, ou l’emploi de levures sélectionnées. »
Sur l’Ouest de la Touraine, les quantités s’annoncent très faibles, hormis pour Saint-Nicolas de Bourgueil. Fin septembre, les pinots noirs finissent juste d’être récoltés, et les gamays commencent à peine. « La grande difficulté de cette année est l’hétérogénéité des grappes à la récolte. En rouge primeur, je voyais de grosses différences dans les cuves, avec des grappes roses. Il faut donc une grande vigilance pour ne pas extraire les tannins verts », explique Philippe Gabillot de la CA37. Les pH sont en général plutôt bas, ce qui est rassurant pour la gestion de la stabilité microbienne des vins. Gare cependant au botrytis ! « Il y en a partout. En cabernet, au moins 60 % des parcelles semblent atteintes. C’est une épée de damoclesse sur nos têtes, en attendant les maturités phénoliques, surtout avec les petits brouillards matinaux laissant apparaître des petits poils sur les baies. Le botrytis peut aller très vite, même si pour l’instant il n’y a pas de constat de goûts moisi-terreux. ». Malgré tout, il devrait y avoir de très belles choses notamment dans les parcelles non gelées et non stressées, précise Philippe Gabillot. « En pinot noir, nous sommes sur des profils plutôt fruités et aromatiques d’après les premiers retours. Attention à ne pas trop débourber cependant, pas en dessous 250 NTU, l’idéal étant entre 130 et 180 pour avoir de l’aromatique et de la rondeur. »
Dans le Loir-et-Cher, l’année là aussi compliquée (gel, stress hydrique) a entrainé des maturités très diffé- rentes, notamment entre rouges et blancs, observe également Anne Buchet de la CA41 : « Des rouges moins stressés dans certains secteurs sont récoltés avant les sauvignons ! Au global nous estimons le volume de cette récolte 2016 à la moitié d’une récolte normale. » Cependant, avec le beau temps de septembre, les vendanges sont bien meilleures que les scénarii les plus optimistes, reconnait Anne Buchet : « Nous avons des gamays magnifiques, largement mûrs pour faire des primeurs, sur le fruit frais, avec une très belle couleur violet fuchsia. Les vignerons ont commencé à décuver et tout se passe parfaitement bien. Les fermentations évoluent assez vite et dans de bonnes conditions. » Du côté des pinots noirs, les vendanges avancent avec de beaux potentiels en alcool (13-14) et par endroits quelques sur-maturité. Pour les côts et les cabernets, il faudra attendre respectivement une bonne semaine, et 10 à 15 jours, diagnostique la conseillère.
« Ces cépages se sont bien remis grâce à l’eau tombée mi-septembre. Les maturités avancent bien, et on observe un potentiel de couleur parfait. Encore une semaine de très beau temps comme celle-ci, et la qualité sera magnifique ! »