23.11.2021
Matériel végétal
Itinéraires viticoles
Maladies de la vigne
Les résultats des 4 années du Plan National Dépérissement ont été présentés lors d’une matinée d’échange organisée le 18 novembre dernier sur toutes les avancées de la filière dans la lutte contre les dépérissements. Que retenir ?
La mobilisation de la filière viticole contre les dépérissements est née du constat partagé de la baisse pluriannuelle subie des rendements et de la longévité des ceps. Face à ce fléau déclaré « cause nationale » et, pour la première fois depuis la crise du phylloxéra, une animation nationale sur une problématique technique a été mise en place au sein de la filière vitivinicole française. Impulsé par les interprofessions au travers du CNIV et avec le soutien des pouvoirs publics via FranceAgrimer, le Plan National Dépérissement du Vignoble (PNDV) s’est déployé à partir de 2017. Les dépérissements résultant d’une pluralité de causes et de facteurs aggravants, il fallait d’agir sur tous les fronts, sans qu’il soit possible d’identifier « une solution » susceptible de répondre aux multiples enjeux en présence. Les résultats obtenus à ce jour sont le fruit d’une mutualisation des forces et des moyens : la filière viticole a mobilisé 7 millions d’euros en 4 ans, auxquels se sont ajoutés 5 millions d’euros de soutien public. Ils sont à la disposition de tous les acteurs de la filière sur le site du PNDV au travers d’une vingtaine de fiches techniques, d’une dizaine de webinaires et d’un outil d’aide à la décision. S’il est difficile de résumer 4 années de recherche sur une trentaine de projets, il est donc possible à chacun de trouver de quoi répondre à tout ou partie de ses questions et de s’approprier ces acquis. Nous reprenons ici, une partie des résultats présentés lors de la matinée.
« Les avancées du Plan » en vidéo
Les carnets du plan, 2nde édition
Le premier des acquis permis par le PNDV est le rapprochement de la filière des pépiniéristes à celle de la viticulture. Ce rapprochement s’est concrétisé dans la mise en œuvre du projet Origine qui a étudié la qualité des plants de vigne et l’amélioration des taux de reprise au greffage. De ce travail a découlé de nouvelles connaissances sur la qualité du point de greffe qui permettent d’établir un ensemble de critères validés et quantifiés pour aider au tri des plants. De nouvelles connaissances sur l’anatomie et le fonctionnement du bois de jeune plant éclairent sur la circulation de l’eau dans ce dernier et les conditions de développement des nouveaux tissus conducteurs. Autre acquis, la création d’une marque, Vitipep’s, valorisant la qualité sanitaire des plants fabriqués en France et la professionnalisation de la filière en intégrant la formation sur la reconnaissance des maladies et l’ampélographie au cahier des charges. La dynamique ainsi initiée a également abouti à la création d’une instance nationale de coordination du matériel végétal dont la première mission sera d’établir un schéma général de diffusion du matériel de base puis d’assurer le suivi de la mise en œuvre des projets des établissements de pré-multiplication (culture sous serre insect proof).
Les résultats du projet Physiopath révèlent que la taille des vaisseaux influence la capacité de la vigne à limiter la progression des champignons responsables de l’ESCA : plus la densité de gros vaisseaux est importante, plus la plante est vulnérable. Par ailleurs, les chercheurs ont observé que la sécheresse inhibe l’expression des symptômes d’ESCA sans pour autant endiguer la maladie. « Si la sécheresse n’est pas la solution contre l’ESCA, celle-ci étant avant tout un facteur limitant la productivité, cet acquis permet en revanche de comprendre le fonctionnement physiologique de la plante face à l’ESCA », souligne Chloé Delmas de l’INRAE et responsable du projet. Ces résultats associés au fait qu’il existe une large gamme de variation de la résistance à l’embolie entre les cépages, laisseraient envisager la possibilité de sélectionner des cépages moins vulnérables à la sécheresse et à l’ESCA. Autre résultat obtenu, l’ESCA provoque un dysfonctionnement hydraulique de la plante dû à des occlusions du xylème par des thylloses et des gels.
Et pourquoi pas ? C’est en tout cas le rêve de Cédric Moisy de l’IFV et responsable du projet Vitimage. « Ce projet, a révélé la complémentarité de l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) et de la tomographie aux Rayons X (RX) pour distinguer les différents niveaux de dégradation du bois : sain, nécrosé ou l’amadou, qui est un bon indicateur de l’état de la plante » explique-t-il. Un pied de vigne ne manifestant pas de symptômes foliaires peut néanmoins contenir plus de 60% de tissus nécrosés, selon les observations. Ainsi Cette approche innovante, basée sur l'imagerie 3D et l'apprentissage automatique, permet de mettre en lien l'histoire de vie des ceps étudiés et le niveau de développement des maladies du bois sans destruction. Une porte ouverte à de nouvelles applications en termes de gestion de parcelle et de suivi de maladies.
Le court-noué peut être responsable de la perte de 80% du rendement d’une vigne atteinte par cette virose, impactant également la qualité des raisins et la longévité des ceps. Mais tous les plants ne réagissent pas de la même manière dans les parcelles atteintes. Au travers du projet Vaccivine, les chercheurs ont mis en avant que ces ceps ont été contaminés par des variants peu symptomatiques du virus. Il s’avère qu’un même pied de vigne peut être affecté par deux ou trois variants. Des travaux ont alors commencé sur la prémunition. « L’idée est d’inoculer un variant faiblement pathogène du virus GFVL afin de protéger le cep d’une surinfection due à un variant plus agressif transmis par le nématode. De nouveaux variants hypoagressifs ont été identifiés, sélectionnés et conservés dans des accessions de vigne à l’INRAE pour poursuivre les travaux sur la prémunition », rend compte Olivier Lemaire de l’INRAE et responsable du projet.
Les paramètres influençant la probabilité d’une parcelle d’être infectée par la flavescence dorée ont été étudiés dans le projet CoAct. Le facteur cépage a été mis en exergue. Ainsi une parcelle de sauvignon a plus de probabilité d’être infectée par la flavescence dorée qu’une parcelle de cabernet franc. « L’étude génétique de la sensibilité des cépages met en avant un déterminisme génétique du caractère sensible. La suite du projet visera à poursuivre la caractérisation de la sensibilité de cépages régionaux et à mettre en conservatoire les descendants peu sensibles obtenus dans les croisements réalisés », annonce Sylvie Malembic-Maher de l’INRAE. L’environnement paysagé est aussi montré comme un facteur à risque. Ainsi, une parcelle située dans un environnement urbain ou de forêt a plus de probabilité d’être infectée qu’une parcelle placée dans un environnement de vigne ou de cépages peu sensibles. A noter que c’est l’environnement proche, dans un rayon de 100 m autour de la parcelle, qui influe sur la probabilité d’infection.