26.02.2018
Itinéraires viticoles
Protection du vignoble
David Lafond de l’IFV d’Angers expérimente depuis 2012 des systèmes de culture à faibles niveaux d'intrants phytosanitaires, sur une parcelle du domaine expérimental IFV de Montreuil-Bellay. Les résultats, sur les performances technico-économiques et les conséquences pratiques du changement de système pour les vignerons, ont été présentés par Esteban Fortin, ingénieur à l’IFV, lors du dernier Sival.
Sur l’essai mené entre 2012 et 2017, deux conduites ont été comparées à la conduite témoin du cabernet franc pour la production de Saumur rouge. La vigne 1a était taillée en guyot simple, alors que la 1b en cordon de royat (taille courte, plus rapide). La conduite agronomique se faisait dans le premier cas avec un enherbement total et des légumineuses sous le rang (1a), et dans l’autre cas avec un travail du sol un inter-rang sur deux, avec l’autre inter-rang enherbé, et les cavaillons travaillés mécaniquement (1b). Le contrôle des bioagresseurs était réalisé quant à lui via Optidose, le modèle IFV, et l’outil Mildium. « L’outil Mildium définit des traitements dits "obligatoires" aux stades 7 feuilles étalées (oidium), floraison (oidium + mildiou) et véraison (mildiou). La réalisation ou non des traitements dits « facultatifs » est raisonnée à l’aide du modèle IFV. Enfin, le module Optidose est appliqué pour chaque traitement afin de réduire les doses utilisées », détaille Esteban Fortin.
Résultats : entre 2012 et 2017, les IFT ont été réduits sur les deux systèmes d’essais comparativement au témoin, avec des valeurs entre 4 et 5, contre 9 à 12 pour la parcelle de référence. La maîtrise des insectes a été très bonne tout au long de l’essai (pas de dégâts de tordeuses ou cicadelles). Pour les maladies, mildiou et botrytis ont été plutôt bien maitrisés sur les cinq années, mais l’oïdium s’est exprimé fortement en 2014. « Il y a eu une grosse attaque d’oïdium cette année-là, et nous sommes surement allés trop loin dans la réduction de dose », reconnaît l’ingénieur IFV. Les symptômes persistant en fin de saison 2015 et 2016, nous avons ajouté un poudrage en 2017 pour son action de choc. »
Sur les rendements, la conduite 1b avec la taille en cordon de royat a entraîné une baisse de rendement en 2012, mais qui a été compensée ensuite en 2013. L’enherbement total (1a) a aussi entraîné une baisse de rendement, mais plus tardive que pour la conduite 1b. En moyenne sur les 5 années, les rendements 1a sont inférieurs aux 1b, eux-mêmes inférieurs au témoin. « Certes, les rendements sont inférieurs dans les deux conduites à la moyenne de l’appellation Saumur rouge, mais les coûts de production, principalement ceux liés à la taille, sont aussi inférieurs », complète Esteban Fortin. La parcelle test étant une ancienne parcelle d’essais porte-greffes, il a été prouvé ici que les porte-greffes Fercal et SO4 s’adaptaient le mieux à l’enherbement pour la conduite 1a.
Sur les conséquences du changement de pratiques, Esteban Fortin juge que « le plus difficile pour les viticulteurs, c’est de réussir à intégrer de nouvelles règles de décisions sur une partie de leurs vignes, sans tout changer d’un coup, car cela peut poser des problèmes sur l’organisation du travail au sein de l’exploitation. La mise en place de règles de décision peut s’avérer complexe à suivre au début, mais elle apporte un côté rassurant au viticulteur. ». Sur le système 1b, l’adaptation au changement de taille est rapide, car le levier est simple. Dans le cas du système 1a, la protection allégée a conduit à un feuillage dégradé en fin de saison, même si l’impact sur la récolte était nul. Ceci a entrainé une faible mise en réserve, à un moment où la vigne en avait besoin pour développer son système racinaire pour s’adapter à la concurrence de l’enherbement total. Avec le recul, il aurait sans doute mieux valu assurer un meilleur état de feuillage en fin de campagne, quitte à traiter un peu plus les premières années, le temps que la vigne s’adapte, avant d’alléger la protection, juge David Lafond.
Si le cas d’un changement de systèmes s’avère complexe et long dans le cas d’une conversion, il est facilité dans le cas d’une nouvelle plantation, grâce à des leviers plus nombreux : variétés résistantes, mise en œuvre d’un système de taille minimale, associations de cultures et plantes relais contre les maladies cryptogamiques, mais aussi usage de nouvelles technologies (capteurs, drones, etc.), liste Esteban Fortin.