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05.05.2022

Etat hydrique des sols, une situation inquiétante


Climatologie

Millésime

Etat hydrique des sols, une situation inquiétante

Si l’année 2021 avait été marquée par un début de millésime remarquablement sec en Val de Loire, le bilan hydrique des parcelles viticoles en 2022 est à ce jour encore plus inquiétant que le millésime précédent. Pour rappel, la croissance des rameaux entre le débourrement et la floraison est prioritaire (Ojeda et Saurin, 2014), mais cette croissance peut être affectée par des niveaux de contrainte hydrique relativement faibles, conduisant au ralentissement voire à l’arrêt de croissance de ces rameaux (Williams et al., 1994).

Grâce à la fonctionnalité « bilan hydrique » développée sur e-terroir par InterLoire et ses partenaires (IFV et ESA), une observation de l’état hydrique de nos sols est désormais possible partout où la cartographie des terroirs à l’échelle fine a été réalisée (Cellule Terroirs Viticoles de l’IFV).

 


Figure 1 : Carte de la proportion d’eau dans les sols disponible pour la vigne sur la commune de Faye d’Anjou au 04 mai 2022 (de gris clair à bleu foncé : contrainte hydrique forte à très forte, modérée, faible, nulle)

 

 

Sur la carte de la commune de Faye d’Anjou (Figure 1), représentant la proportion d’eau dans les sols disponible pour la vigne en ce début de mois de mai 2022, le contraste est important entre des sols bénéficiant encore des 2/3 de leur réservoir en eau disponible pour la vigne en cette fin avril (en bleu foncé, absence de contrainte hydrique), et des sols où ce niveau d’eau est très inférieur (bleu plus clair, contrainte hydrique modérée à forte). Sur ces parcelles à la contrainte hydrique plus importante, la situation pourrait s’avérer préoccupante pour le développement des rameaux en l’absence de nouvelle précipitation dans les jours à venir. Bien entendu à cette échelle, la différence observée en eau disponible pour ces sols est due à une différence de volume du réservoir en eau et non à des quantités de précipitations différentes, les sols de plateau plus épais ayant un réservoir plus important que les sols minces sur le coteau. A contrario et du fait de ce réservoir relativement petit, les sols minces reviendront plus rapidement à des proportions d’eau disponible plus conséquentes lors des prochains épisodes pluvieux (un réservoir plus petit est plus vite rempli qu’un grand réservoir). Au-delà de la quantité d’eau maximale des sols qui peut être approchée par la carte du réservoir en eau des sols (autre carte disponible sur e-terroir), cette notion de bilan hydrique et de proportion d’eau dans les sols disponible pour la vigne est également très importante. En effet, quelle que soit la quantité (exprimée en mm d’eau dans les sols), une contrainte hydrique apparaîtra à partir du moment où la proportion d’eau disponible pour la vigne (exprimée en %) se situera en dessous d’une certaine valeur ; ainsi on peut estimer qu’une contrainte hydrique faible s’installe en dessous d’une proportion de 40 % d’eau disponible (la vigne réduisant sa transpiration), une contrainte modérée en dessous de 20 % et une contrainte forte en dessous de 5 %. En fonction de son stade, la vigne pourra accepter différemment une même contrainte, ainsi si une contrainte modérée à forte peut-être envisagée au moment de la vendange, voire souhaitée, une contrainte même faible sera à proscrire en cette période de développement des rameaux.

Des contraintes hydriques inquiétantes pour certaines parcelles

L’outil disponible sur e-terroir permet également de comparer le bilan hydrique d’une parcelle par rapport aux millésimes précédents. Sur la Figure 2 et pour cet exemple de parcelle, il peut être observé un début de contrainte hydrique en ce début mai 2022 (courbe violette), plus forte qu’en 2021 qui était déjà l’année pour laquelle la proportion d’eau disponible dans le sol était descendue le plus bas. Sur cette parcelle, en date du 04 mai 2022 la proportion d’eau dans le sol disponible pour la vigne est effectivement au plus faible par rapport aux millésimes précédents : 28 % d’eau disponible, contre 51 % l’année dernière à la même date, 86 % en 2020, 62 % en 2019 et 89 % en 2018. L’année dernière, le début du mois de mai avait été marqué par le retour des précipitations, permettant au sol de se recharger en eau, en revanche pour cette année 2022, les prévisions météorologiques sur les prochains jours laissent présager d’une contrainte hydrique record pour un mois de mai, avec une proportion d’eau disponible pour cette parcelle qui pourrait descendre à seulement 15 % pour la mi-mai (courbe pointillée violette).

Figure 2 : représentation graphique de l’évolution de la proportion d’eau dans les sols disponible pour la vigne sur une parcelle à forte réserve en eau ; comparaison multi-millésimes

 

A noter également que sur certaines parcelles sur sols superficiels, possédant un réservoir en eau très faible, la contrainte hydrique est à son maximum depuis le débourrement 2022 (courbe violette de la figure 3) ; si ces contraintes hydriques très fortes sont rencontrées régulièrement sur ce type de sol, qui peuvent à contrario se recharger relativement vite après des précipitations, c’est la précocité et la durée de cette contrainte qui est inquiétante, puisqu’elle est présente sur ce type de parcelle depuis fin mars en continue, soit un mois et demi de contrainte maximum (toujours en cours). En comparaison avec le millésime 2018, peu contraignant, ce type de parcelle n’avait atteint la contrainte hydrique forte à très forte que deux mois plus tard, et seulement sur quelques jours.

Figure 3 : représentation graphique de l’évolution de la proportion d’eau dans les sols disponible pour la vigne sur une parcelle à très faible réserve en eau réserve en eau ; comparaison 2022 et 2018

 

Les résultats pour vos parcelles sur E-terroir

L’intérêt d’un tel suivi pluriannuel, s’il est consulté régulièrement sur e-terroir, est de pouvoir rapprocher le fonctionnement hydrique actuel de la parcelle de celui de tel ou tel millésime connu, et ainsi appréhender au mieux le comportement agronomique de la vigne et de la vendange en le comparant au millésime connu le plus proche en termes de fonctionnement, et anticiper d’éventuelles modifications du mode d’entretien des sols ou de la conduite de la vigne. Il est bien entendu que d’autres facteurs rentrent en considération dans la caractérisation du comportement agronomique de la vigne et la qualité de la vendange, mais l’alimentation en eau de la vigne reste une des principales variables explicatives, n’hésitez donc pas à utiliser régulièrement pour vos propres parcelles la fonction bilan hydrique disponible librement sur E-Terroir. 

Comment gérer la contrainte hydrique ?

Le dernier bulletin technique de la Chambre d'agriculture d'Indre-et-Loire fait un zoom sur la gestion à court terme et moyen terme d'un déficit hydrique et les actions possibles au vignoble.

 

Etienne Goulet , IFV Val de Loire-Centre/InterLoire

 

 

Références bibliographiques :

Ojeda H. et Saurin N., 2014 ; Innovations Agronomiques 38, 97-108

Williams L. E., Dokoozlian N. K., Wample R., 1994. Grape. In : B. Shaffer and P. Andersen (Eds.), Handbook of Environmental Physiology of fruit crops. Vol. I. Temperature crops. CRC Press, Inc. Florida - USA. pp. 85-133

 

 

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