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27.01.2015

Connaissances de la biodiversité du sol : un nouvel indicateur


Environnement

Connaissances de la biodiversité du sol : un nouvel indicateur

La plupart du temps, la gestion de la fertilisation ou du travail du sol repose sur les analyses chimiques (teneurs en N,P, K, carbone…) et physiques (tassement, profil structural…) des sols. De nombreux organismes de recherche1 travaillent sur de nouveaux indicateurs afin de décrire et de quantifier la vie dans le sol. Rencontre avec Elisabeth Vérame de l’Observatoire français des sols vivants et de Lionel Ranjard de l’UMR Agroécologie de l’Inra de Dijon à l’occasion d’une conférence au Sival sur les  avancées de la recherche.

Comment expliquez-vous le lien direct entre la fertilité et la biodiversité des sols ?

Lionel Ranjard : Dans un gramme de sol, on retrouve jusqu’à un milliard de bactéries, entre 1 et 3 mètres de mycélium, entre 1000 et 2000 nématodes… Des chiffres qui montrent une biodiversité incroyable dans le sol. Les microorganismes dégradent la matière organique en matière minérale et ont donc une grande part de responsabilité dans la fertilité biologique des sols. Si on s’intéresse aux microorganismes, ce sont des ingénieurs biogéochimiques qui recyclent les nutriments, structurent et détoxifient le sol. Ils peuvent créer des relations de symbiose bénéfiques pour les végétaux ou encore décomposer les chaines carbonées. Par ailleurs, chaque espèce de la microfaune, macrofaune ou encore mésofaune assure des fonctions biologiques indispensables dans la pérénité fonctionnelle des sols (régulation des microorganismes, décomposition de la matière organique modification du cycle du carbone…).

Quels nouveaux outils avez-vous développé pour mesurer l’activité microbienne ?

Lionel Ranjard : Au sein de l’unité d’Agroécologie de l’Inra de Dijon, nous avons travaillé sur le métagénome microbien du sol. L’analyse de l’ADN du sol nous permet de mesurer l’abondance et la diversité taxonomique, génétique et fonctionnelle des microorganismes du sol. Nous arrivons à séquencer tous les microorganismes et à mesurer l’abondance relative des principales espèces ou groupes fonctionnels en pourcentage.

L’accumulation récente et exponentielle de données sur la biologie des sols collectés par différents organismes nationaux et internationaux ont permis la mise au point de modèles prédictifs sur la biomasse et la diversité microbienne des sols. Le tout n’est pas de faire un patchwork de résultats d’analyses mais de combiner les indicateurs pour connaître les valeurs de références nationales en fonction des types de sol. À partir de là, on a mis au point des curseurs pour savoir si telle ou telle parcelle dispose d’une biodiversité suffisante.

Dans le cadre du projet CASDAR AgrInnov (financé par le ministère de l’agriculture) et avec l’ensemble des organismes  partenaires (INRA, CNRS, Université Rennes, AgroSup Dijon, ISARA Lyon, ESA, Elisol Environnement, IFV, ITAB, CA 49), nous avons mis au point un tableau de bord constitué d’indicateurs biologiques élémentaires qui servent à élaborer des indicateurs de synthèse permettant de diagnostiquer la qualité biologique des sols.

En plus, les mesures biologiques sont enrichies d’indicateurs agronomiques grâce :

  • au test bêche pour caractériser la structure du sol, sa porosité ou encore l’état du sol. Ce test consiste à diagnostiquer l’état de la structure du sol à partir d’un volume de sol prélevé à la bêche. Il s’agit ensuite d’examiner la tenue du bloc, à le fractionner, observer les racines, cailloux…
  • au litterbags pour étudier la dynamique de minéralisation de la matière organique. Des sacs contenant une quantité connue de matière végétale (paille) sont enfouis dans le sol. Ils sont ensuite prélevés à date régulière permettant ainsi de suivre la dégradation de cette matière et par extraction les populations (champignons et microarthropodes) qui se trouvent sur les résidus.
  • au test physico-chimique qui informe sur la toxicité du milieu ou encore son statut trophique et chimique

 

Lentes et multifactorielles, les répercutions d’un mode de conduite sur la fertilité d’un sol sont difficiles à appréhender. Quels moyens sont mis à disposition pour présenter vos avancées et les mettre à profit des vignerons ?

Élisabeth Verame : Le projet CASDAR AgrInnov a permis de tester, par des agriculteurs, des outils opérationnels validés par la recherche pour évaluer l´impact des pratiques agricoles sur la qualité biologique des sols. L’OFSV propose des formations pour les agriculteurs, les formateurs ou encore les technico-commerciaux. Ces formations abordent les enjeux du maintien de la biodiversité pour la qualité des sols à travers :

  • Les fonctionnements physiques, chimiques et biologiques des sols
  • Les indicateurs descriptifs de l’état des sols : biologiques (microorganismes, nématodes, lombriciens) et agronomiques (physiques, chimiques, test bêche, litterbags,
  • Les effets des pratiques culturales sur la vie des sols
  • Les services écosystémiques potentiels rendus

Les résultats issus des différentes analyses du groupe d’agriculteurs sont le point de départ d’échanges sur les pratiques de chacun. Les résultats sont comparés de façon anonyme. L’expérience montre que ces échanges sont très constructifs et pertinents. Sans jugement, ils permettent à chacun d’envisager des améliorations des pratiques culturales en ciblant spécifiquement les actions correctives si le besoin est avéré.

Note 1 : L´organisme chef de fil de ce projet est l´Observatoire français des sols vivants (OFSV). Les différents partenaires sont constitués entre autres d´écoles d´agriculture (ESA Angers, ISARA Lyon), d´instituts techniques (ITAB, IFV), d´instituts de recherche (équipe OPVT de l´université de Rennes, unité INFOSOL de l´INRA d´Orléans, UMR Agroécologie de l´INRA de Dijon), les chambres d´Agriculture sont représentées par la Chambre d´agriculture du Maine et Loire. Le Comité de Développement Plaine-Marais (CDPM), adhérent de l´OFSV, participe à cette action.

 

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