29.11.2018
Matériels / Équipements
Bakus du champenois Vitibot, Ted de la startup toulousaine Naïo Technologies, Pumagri de la société nantaise Sitia et enfin les robots tondeurs de Vitirover basée à Saint-Emilion. Pour comparer les solutions robotisées dédiées à la viticulture, une conférence était organisée par l’IFV au Vinitech 2018.
Faible consommation d’énergie, tassements de sol réduits, polyvalence, déplacement à vitesse maîtrisée avec des capteurs pour éviter les blessures sur les ceps, travail à toutes heures du jour et de la nuit, relevé de données sur la vigne (manquants, maladies, etc.)….., les robots autonomes ont su créer beaucoup d’attentes chez les vignerons ces derniers temps. Si les premières préséries sont à l’œuvre dans les vignes, les phases de commercialisation chez les divers constructeurs sont plutôt prévues pour 2020-2021. Avec son « troupeau de robots tondeurs industriels et autonomes », Vitirover basée à Saint-Emilion veut s’imposer dans l’après glyphosate, souligne Arnaud de la Fouchardière, directeur général de l’entreprise : « Nous ne vendons pas nos robots mais des surfaces entretenues ! » En effet, la société propose en prestation l’entretien de l’enherbement des vignes par une flotte de robots supervisée par un « berger », salarié de Vitirover, qui se chargera de déplacer les robots et d’en assurer la maintenance. « Avec un couvert permanent de 4 à 6 cm, les racines herbacées vont peu en profondeur, et ne sont pas concurrentes de la vigne », insiste Arnaud de la Fouchardière. Déjà une cinquantaine de robots de 20 kg avançant à 200 m/h sont sortis d’usine, bientôt suivis d’une cinquantaine supplémentaire, et 200 à 1000 devraient ensuite être construits dans les mois/années à venir. Pour expliquer le coût de sa prestation, Vitirover évoque l’absence de pieds abimés par le travail du sol classique. La prestation revient à un coût annuel de1500 à 3500 euros/an/ha selon le schéma de la parcelle.
À quelques mètres l’un de l’autre dans les allées du Vinitech 2018, Ted et Bakus suscitaient la curiosité des visiteurs. Après le petit robot Oz puis Dino pour le maraîchage en planche, Naïo Technologies travaille sur les robots Jo (chenillard) et Ted (enjambeur) destinés aux vignerons. 100% électrique, fabriqué en France et se déplaçant par signal GPS et laser et avec 8h d’autonomie, Ted réalise du désherbage mécanique, mais aussi de la tonte, épamprage, rognage, et peut-être ensuite de la pulvérisation. « C’est un porteur qui est capable d’intégrer différents éléments. Nous échangeons avec les constructeurs de matériel afin d’adapter les outils à nos robots qui se déplacent moins rapidement qu’un tracteur », souligne Guillaume Delprat, responsable marché vigne chez Naïo, précisant qu’un robot peut gérer 15 ha en vignes étroites, et 40 ha en vignes larges. Une dizaine de robot Ted sont en expérimentation chez des clients. Plus lourd que Ted (800kg), l’enjambeur électrique monorang Bakus (2,1 t à vide) limite les tassements de sol, indiquent ses concepteurs. Avec des batteries lui offrant 10h d’autonomie, il est adapté aux terrains en pente jusqu’à 45% et avec un dévers jusqu’à 10%. « Bakus se déplace à l’aide de 8 caméras, ainsi qu’une intelligence artificielle à la différence de ses concurrents », souligne Cédric Bache, fondateur de la startup rémoise qui emploie désormais 40 personnes. Là aussi, le travail du sol est le premier objectif de Bakus, même si la pulvérisation confinée est à l’étude. « Beaucoup de vignerons pensent qu’un robot coûte cher, mais comparé à un tracteur traditionnel, nos robots sont moins onéreux et plus fiables, car ils ont moins d’actionneurs. Et les prix vont diminuer énormément dans les années à venir ! » Même constat chez Naïo : « L’hydraulique et les moteurs thermiques entraînent beaucoup de problèmes et nécessitent une maintenance régulière, alors qu’avec l’électrique, la maintenance est beaucoup moins coûteuse ! »
Plus discrète, la startup Nantais Sitia s’est lancée depuis 5 ans dans la robotique agricole, avec la mise au point d’un véhicule polyvalent, destiné au maraîchage, l’arboriculture et la viticulture : le Pumagri, présenté notamment au Sival 2018. À la différence de ses deux concurrents précédents, ce robot est équipé d’un moteur hybride, avec un groupe thermique qui recharge les batteries lorsqu’elles sont faibles. « Le robot peut ainsi tourner uniquement sur moteur électrique silencieux la nuit ou à proximité des habitations », précise Jérôme Petit, directeur technique Sitia. Là aussi, le travail du sol est ciblé en priorité, suivi d’essais en pulvérisation confinée fin 2019 et de l’entretien des plants (rognage). « Un robot pourra gérer 20 ha, sur l’ensemble de l’itinéraire technique », précise Jérôme Petit. Si une présérie a déjà été vendue à des partenaires pour une livraison en 2019, la commercialisation est prévue en 2020.
L’arrivée des robots risque de changer le métier de viticulteur, « l’orientant davantage sur de la gestion logistique et de l’organisation de travail de ses robots » d’après Jérôme Petit. Autre évolution : une fréquence de passage plus élevée pour le travail du sol, tous les 15 jours, souligne Guillaume Delprat, qui est optimiste sur le temps de prise en main : « en seulement 2h, d’après notre expérience, et avec une formation de 4 demi-journées pour une maîtrise totale du robot. ». Les robots vont aussi permettre de nourrir des bases de données sur chaque pied de vigne, pour des itinéraires techniques un jour adaptés de façon individuel, projette Arnaud de la Fouchardière. Si des questions réglementaires se posent quant aux déplacements des robots sur la voie publique, Cédric Bache est convaincu que « les véhicules autonomes agricoles arriveront avant les voitures autonomes, car en avançant à 10 km/h maximum, nos robots sont capables de s’arrêter quasi instantanément, ce qui réduit très fortement les risques d’accident ! »