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22.02.2022

Quels enseignements du coup de chaleur du 28 juin 2019 ?


Climatologie

Quels enseignements du coup de chaleur du 28 juin 2019 ?

Chacun se rappelle de la vague de chaleur exceptionnelle qui a frappé la France en 2019. Le pic de chaleur du 28 juin a été intense (de nombreux records absolus ont été battus), précoce (avant la fermeture des grappes) et soudain (car précédé par un climat doux). Une analyse des impacts de cet évènement climatique met en avant l’effet aggravant de certains facteurs sur les pertes de récolte.

Plus de 1 500 exploitants viticoles de l'Hérault et du Gard déclarent être sinistrés à divers degrés. Au total, ce sont 2315 déclarations et expertises qui sont compilées pour analyser les impacts de ce pic de chaleur sur le vignoble de l’Hérault et du Gard. Plusieurs facteurs semblent avoir été aggravants et d’autres atténuants. Mais les avis contradictoires sur le terrain, ont révèlé un besoin d’analyse complémentaire. Un rapport d’expertise a été commandité par la DDTM à des équipes de recherche de MontpellierSupAgro et de l’INRAE avec 3 objectifs : Analyser objectivement les données recueillies, formuler des recommandations, proposer un questionnaire pour le futur. Leurs conclusions ont été présentées lors du séminaire LACCAVE de novembre 2021.

Les dégâts décrits par les vignerons sinistrés sur les plants adultes sont en cohérence avec les connaissances sur le bilan d’énergie des organes végétaux :

  • Les baies les plus exposées sont les plus touchées
  • Les baies proches du sol sont souvent plus touchées
  • Les baies sont plus souvent touchées que les feuilles
  • Les parties apicales sont épargnées et restent vertes dans la majorité des cas.

L’analyse des facteurs a permis de mettre en avant les conclusions suivantes :

  • le principal facteur provoquant les dégâts (% pertes de récolte) est l’intensité du pic de température sur la commune, mais ce n’est pas le seul.
  • Il n’a pas été démontré de lien avec le stress hydrique, qui aurait pu être pressenti comme un facteur aggravant : il n’a pas été constatée de corrélation entre les niveaux de réserves hydriques du sol en sortie d’hiver des différentes communes viticoles avec les symptômes de stress hydriques au moment du pic ou plus tardivement en juillet.
  • Un lien significatif a été démontré avec le pouvoir évaporant de l’air, effet collatéral du réchauffement, souvent négligé et pourtant phénoménal.
  • Le vent était relativement faible le 28 juin (de 4 à 15 km/h en moyenne). Alors que son effet est réputé aggravant (« un vent chaud », « effet chalumeau »), il a été constaté un effet atténuant significatif avec un seuil à 10 km/h.
  • L’effet cépage ressenti sur le terrain n’est pas avéré, mis à part pour le carignan. Pour les sensibilités des cépages, une confusion est possible avec le stade phénologique (véraison précoce du chardonnay plus impacté que le merlot), le type de sol choisi ou la conduite associée au cépage
  • La corrélation entre % de pertes et dose de soufre appliquée est quant à elle clairement établie et son impact significatif : en moyenne + 21% de pertes de récolte avec l’utilisation du soufre. Plus l’application est proche du pic de chaleur, plus les dégâts sont importants (de +37% de dégâts supplémentaires pour des applications de soufre à J-1 à +3% de dégâts pour des applications à J-15). Cela s’expliquerait par l’impact d’une température élevée qui accélère la sublimation du soufre, qui devient agressif aussi pour le végétal. Il a été constaté des différences significatives entre formes commerciales, mais pas de différence détectée entre formes mouillables ou poudre.
  • L’orientation des rangs est également non négligeable, avec de forts dégâts sur les faces Ouest des rangs orientés Sud-Nord. Cela est en cohérence avec la littérature : en été, le taux d'énergie solaire absorbée par les vignes orientées Sud-Nord peut être de 15 à 27% supérieur à celui reçu par les vignes orientées Est-Ouest.
  • Les effets pressentis du palissage ou de l’effeuillage n’ont pas été prouvés dans cette étude, mais certaines pratiques, comme l’effeuillage, avaient été peu réalisées sur le vignoble de l’Herault et du Gard en 2019.

Les jeunes vignes ont subi plus de dégâts :

  • Les pertes de récolte sont significativement plus importantes chez les vignes jeunes (moins de 7 ans) que chez les vignes âgées.
  • Les densités supérieures à 4100 pieds/ha sont associées à une perte de récolte significativement plus importante (22% +/-8) comparée aux densités inférieure (14% +/-6)
  • Les vieilles vignes peu vigoureuses ont tendance à avoir subi également plus de dégâts.

L’effet de l’âge resterait à analyser davantage, mais la moindre résilience des jeunes vignes à un pic de chaleur serait probablement liée à leur fragilité hydraulique, avec une alimentation par les racines trop faibles par rapport aux pertes d’eau via le feuillage.  A partir de cette étude, une grille de notation a été établie pour calculer le risque de la parcelle en cas de pic de chaleur, et proposer des recommandations de pratiques à court terme.

 

Retrouvez une présentation des conclusions de ce rapport d’expertise lors du séminaire de clôture de LACCAVE

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